17-19, rue Visconti



Immeuble du 17-19, rue Visconti photographié par l'UPF en 1914 (Archives de Paris).


Histoire

Cette maison est bâtie sur le terrain propriété jusqu'en 1789 de l'Université et appelé le petit Pré-aux-Clercs. Lors du premier partage du petit Pré-aux-Clercs en 1543 par Pierre le Clerc, ce dernier se réserve une parcelle pour lui-même. Elle comprenait alors les actuels 17-19 rue Visconti, 24 et 26, rue Jacob. En 1604, elle est propriété des Lusson, puis des Loiseau en 1658, puis des Dormesson vers 1730. A cette époque, la maison donne sur la rue du Colombier (aujourd'hui rue Jacob) avec un grand jardin derrière aboutissant à la rue des Marais (rue Visconti). Le plan Turgot peut donner une idée de sa topographie.


Extrait du plan Turgot de 1739. La parcelle dont il s'agit est surlignée en rouge. La maison donne sur la rue du Colombier, aujourd'hui rue Jacob.


A la fin du XVIIIe siècle, la maison est toujours composée de la même façon : façade sur la rue du Colombier et jardins aboutissants à la rue des Marais. Le plan levé par Jaillot en 1773 ne détaille d'ailleurs qu'elle dans l'îlot sud de la rue des Marais. Cela peut indiquer que c'est le jardin le plus important de l'îlot.


A gauche, extrait du plan Jaillot de 1773 (parcelle surlignée en rouge). A droite, relevé cadastral de Vasserot vers 1822 montrant la maison avec sa façade sur la rue Jacob (en bas) et les jardins s'étendant jusqu'à la rue Visconti (en haut) avec deux petits pavillons d'angle. Photos : B.E.-R.


Vers 1826, un nouveau propriétaire, M. Prestat, fait construire la maison actuelle au bout du jardin en bordure de la rue des Marais et sur un nouvel alignement. C'est à ce moment que Balzac y installe son imprimerie (1826-1828), soutenu par son mentor, Laure de Berny.


Portrait de Balzac à l'époque de l'imprimerie (cliché BER).


Lettre signée de Balzac à en-tête de son imprimerie, « rue des Marais St-G, N°17 » (cliché BER).

Balzac y connait l'échec que l'on sait. Madame de Berny est alors amenée à règler les dettes contractées par sa gestion malheureuse. Elle fait entrer son fils dans la nouvelle entreprise de fonderie de caractères Balzac-Deberny et Terrier. Ce fils, Alexandre Deberny (il abandonne sa particule), se consacre entièrement au sauvetage d'une partie de l'imprimerie, qui devint florissante. Avec son fils adoptif, Charles Tullieu, qu'il instruit des techniques de création, de gravure et de fonderie, Deberny mène l'affaire de main de maître : à la fin du XIXe siècle, 90 ouvriers y travaillent. Alexandre Deberny était également Saint-Simonien, il fut un des organisateurs des retraites ouvrières et il institua, après Leclaire, la participation du personnel aux bénéfices.


Exemple de fonderie à gauche. Portrait d'Alexandre Deberny (1809-1881) à droite. Collection B.E.-R.


L'entreprise finit par quitter le 17-19, rue Visconti vers 1890. En 1921, Girard succéde à Tullieu, la fonderie de caractère devenant alors Girard et Cie jusqu'en 1923, date à laquelle est crée l'entreprise Deberny et Peignot qui dure jusqu'en 1970. Les locaux de la rue Visconti quant à eux conservent leur vocation industrielle en abritant de 1891 à 1934 Garnier puis Herment qui y fabriquent des registres et cahiers. Leurs enseignes peintes sont visibles sur plusieurs photos. Il parait que certains des locataires qui ont ensuite habité les lieux ont retrouvé des caractères d'imprimerie entre les lattes du plancher !


Exemples de logos et de caractères fondus par l'atelier de typographie Deberny & Cie au 17, rue Visconti. Collection B.E.-R.

En parallèle, l'atelier d'artiste du 19 a accueilli plusieurs illustres personnages. Au premier chef, on trouve Delacroix qui y logea pendant près de 10 ans, de 1835 à 1844. Il y peignit notamment au printemps 1838 le portrait de Chopin au piano (Musée du Louvre) et de George Sand l'écoutant dans « une attitude tout à la fois de profonde réceptivité et de rêverie amoureuse » (Sylvie Delaigue-Moins, Chopin chez George Sand à Nohant). Le 5 septembre suivant, Delacroix demandera d'ailleurs à son ami Pierret d'intervenir auprès de Pleyel afin qu'il fasse enlever de son atelier le piano qui y avait été monté pour le portrait.


Différentes vues de l'atelier du 17-19 peintes par Constant Le Breton.
On voit par la baie vitrée, le haut des immeubles de la rue Visconti, en direction de la rue de Seine.


Il y eut également l'affichiste Cassandre, puis le peintre graveur Constant Le Breton.



Galerie

Vue depuis le toit du 11, rue Visconti vers le 17-19. Au premier plan, les toits de la résidence Visconti (cliché B.E.-R.).
La rue Visconti dans les années 1950. On voit l'ancien bâtiment du 15 en saillie, avec l'échoppe du cordonnier.
Chambre de Balzac au 19, peinte par Frédéric Léon vers 1900 (cliché BER).
Relevé de façade effectué en 1962 pour le projet Berry (cliché BER). Le tracé au crayon à papier est une esquisse de l'agrandissement projeté de l'immeuble.
Vue depuis l'atelier du 19, en direction de la rue de Seine (cliché BER).
Le 17-19, rue Visconti, côté jardin, en 1947 (Extrait de Petits Loyers de Léo Larguier).
Porte du 17, rue Visconti.
Porte du 19, rue Visconti.
Détail du 17, rue Visconti.
La plaque en souvenir de la présence de Balzac.
© ND / Roger-Viollet.
Escalier du 19, rue Visconti où habitait Honoré de Balzac en 1822-1827.
Le même escalier aujourd'hui.
Immeuble du 17-19, rue Visconti photographié par l'UPF en 1914 (Archives de Paris).
Intérieur de la librairie de JNF Production.
Intérieur de la librairie de JNF Production.
Détail du 17, rue Visconti
Détail du 17, rue Visconti.
Détail du 17, rue Visconti.
Gravure de la rue Visconti, au niveau de l'imprimerie de Balzac.
Au niveau du 17, rue Visconti avant la démolition du 15. On y voit le cordonnier dans l'angle, ainsi que le panneau du restaurant qui se tenait au 15, rue Visconti.
"Cordonnier, rue Visconti" (1950). Aquarelle de Solange de Bièvre.
© Collection Roger-Viollet.
Dessin des trottoirs avant réalisation en 1870.
Cadastre (plan du rez-de-chaussée) levé par Philibert Vasserot au cours de la première moitié du XIXe siècle. La rue Visconti est en haut, la rue Jacob en bas.
Cadastre Vasserot, détail du bâtiment sur la rue Visconti.
La rue Visconti au niveau du 17-19. Gravure de Lepère, 1903.


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